03/03/2016
FURET
Clara Regy nous livre avec ce Furet, prix des Trouvères 2015, des bribes d’enfance, souvenirs d’une petite fille de huit ans laissée dans une ferme, prise en charge par une vieille femme, peut-être une tante, alors que sa mère est partie. Aux scènes de vie quotidienne de la ferme, avec les hommes bruns / de bouse chaude, le cochon que l’on tue et dont le sang forme un collier liquide, la naissance d’un veau, les haricots que l’on cueille, s’ajoute le vécu de la petite fille qui rêve de s’évader de là, enfant qu’on oublie / au bord / et qui goûte à la mort, sa tristesse – elle n’était pas / venue / - ma mère -, sa peur dans cette campagne pleine d’ombres et de plantes qu’elle ne connaît pas. L’enfant voit des choses qu’elle ne comprend pas, une vache morte – je crois / qu’elle me regarde / et que c’est de ma faute –. Il y a aussi cette vieille femme, évoquée de façon récurrente, qui s’occupe d’elle mais qui n’est pas une maman, et qui demeure une étrangère. Pourtant, çà et là apparaissent des pépites de plaisir, le vin du goûter, les poupées de maïs / en chevelure folle / nattées indiennes, et jusqu’à ce petit corps / luisant / de savon / chaud aperçu par-dessus un muret. La vieille femme apparaît de plus en plus souvent dans les dernières pages du recueil, comme si naissait une forme d’attachement, et l’enfant voudrait la défendre des riches dames du château devant lesquelles elle se courbe. Des années plus tard, Clara Regy se souvient de cette femme qui, avec l’âge, retomba en enfance : je la vois moi / je disais / je la vois // et encore // aujourd’hui / peut-être.
Clara Regy, Furet. Editions Henry, 2016
13:14 Publié dans Chroniques
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