17/07/2019
OURLETS II
À gauche, les notes du père, à droite, les mots de la fille. Clara Regy est restée proche de son père, et est aussi restée attentive aux petits riens du quotidien de son paternel : menues courses (et listes de commissions), lierre descendu du mur des voisins, grattage de la terre, repiquage des salades, plantation des dahlias… Cette attention se ressent dans les notes menues que l’on imagine écrites par son père, et qu’elle a retranscrites :
semé laitue d’hiver Merveille
rhume Humex comprimé et gélules
plus de 25 mm de pluie
dans la nuit
Autant de petites notes, qui sont comme les notes d’un journal, esquissées au jour le jour : les menus événements, faits et activités de tous les jours d’un père plus très jeune et menant une vie simple. Les poèmes de la fille, à droite, parlent du père, de ce que la fille retient de celui-ci, de leur relation :
parfois ta bouche parle
tu ne racontes rien
je n’ose te le dire
parfois ta bouche parle
et me fait mal
aussi
quelques mots
perdus
Clara Regy dessine le portrait de son père, qui est resté attaché à la terre, à son jardin :
tu cramponnes le temps au creux des arrosoirs
sans doute un peu moins pleins
la pomme fait semblant
de pleurer davantage
au-dessus des patates
dans le creux de la terre
Elle parle de la toile du jean, de la blouse de travail bleu bugatti, des femmes qu’il regarde ou dont il se souvient avec gourmandise – nous avons tous les deux / passé l’âge / de rougir. Elle parle des légumes de son jardin, des œufs de poule ramassés, dont il est si fier. Un recueil presque à quatre mains, dans lequel père et fille partagent une touchante proximité.
Clara Regy, Ourlets II. Lanskine, 2019
17:24 Publié dans Chroniques
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