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17/05/2008

NYMPHEAS

Jardin des Tuileries
Les chaises de fer
Bordent les nymphéas
La lumière se mêle
Entrelacs
De mauves et de bleus.

21:38 Publié dans La poésie des autres

16/05/2008

LECTURE DE LA VIE

La lecture de la vie conduit à l'écriture. Elle ne cesse de la provoquer et de la nourrir. L'identification entre réalité extérieure et réalité intérieure s'établit dans le poème. Empruntant aux deux ordres, et en conjuguant les effets, il figure une zone frontière où tous les échanges sont possibles. Il aide à vivre. Il aide à rêver. Il est le territoire des choses vues et celui des choses inventées en perpétuelle interaction. Le contrôle de ce battement fonde la pertinence poétique.


Jean-Max Tixier, Le grenier à sel, 350ème Encres vives, sept. 2007

22:55 Publié dans La poésie des autres

15/05/2008

KAILASH

Ici s'accouplent les nuages et la terre
pour un regard d'aigle

autour de la montagne-temple
marchent des êtres de lumière et de poussière

dans la conflagration des temps des fleuves
et des vents

***

Voici les lacs de turquoise et de lune
les collines de corail
la dentition des squelettes

chaque roche gravée
une parure d'ossements

***

Un peuple de lumière et de poussière
s'enivre de foudre

puis dévale les sentiers

***

claquètements des lassos halètements
yacks porteurs pèlerins
se hissent

des êtres de lumière et de poussière
palpent la chair du mandala


Geneviève Vidal, Libations, Jacques André Éditeur, 2005

19:25 Publié dans La poésie des autres

14/05/2008

LE POISON BLANC

le poison blanc
glisse dans mes veines
sous ma peau plus fine
de jour en jour

je sens le liquide
ronger l'intérieur
de mes bras
sous perfusion

euthanasie


entre le verre et la menthe, Jacques André Éditeur, 2008, p. 24


Pour ne pas oublier...

Ce livre a été écrit dans un esprit de résistance.

Comment nommer l'aliénation, quand la singularité est menacée par le joug du conformisme et de la négation ?

Résistance face à l'adversité, alors que ma liberté individuelle a été fortement remise en question.

Je remercie celles et ceux qui m'ont accompagnée, de près ou de loin, m'ont encouragée à poursuivre ce chemin merveilleux et tortueux qu'est la poésie.

18:46 Publié dans La poésie des autres

LA BULLE

Elle a pété, la bulle,
Celle qui emprisonnait,
Celle qui isolait
du monde.

La transparence reste
et s'étend jusqu'aux
gens

L'espace aérien
garde ses moutonnements,
le vol des oiseaux,
les rires des enfants,
les danses qui emportent
dans un autre univers

Le mur de verre
– l'aquarium –
s'est éclaté la tronche
contre le pavé

Et mon doigt hésitant
à tâtons se rapproche
comme un aimant
des gens


in Verso n°130 (sept. 2007)

11:29 Publié dans La poésie des autres

13/05/2008

LE VENT

"Je t'aime", répète le vent à tout ce qu'il fait vivre. Je t'aime et tu vis en moi.


René Char, Fureur et mystère, NRF Poésie/Gallimard, 2006, p. 32

21:32 Publié dans La poésie des autres

CE QUI SE POURSUIT

Ce qui se poursuit là
N'a pas de commune mesure
Ce sont des phares
Jetés dans l'absence
La nuit que je voulais fuir
Me rapproche de moi-même
L'encre efface les étoiles
Les cigales se sont tues
Les vers luisants.


Le chant de l'ange, Encres vives, 2007

14:52 Publié dans La poésie des autres

12/05/2008

LES AILES DE CAMILLE

Un soir, alors qu'elle venait de lui "lire" une histoire en s'aidant des images et des mains, Camille, qui n'avait pas cinq ans, s'était levé d'un bond et avait attrapé un petit papillon de nuit empêtré dans le rideau. Il avait de la poudre d'écaille or et argent sur les doigts. Le papillon tremblait au creux de sa main, les ailes à moitié transparentes, en piteux état. Camille pleurait, voulait remettre les écailles sur les ailes, mais la poudre d'or et d'argent collait à sa peau et il ne faisait qu'aggraver les choses. Il s'était finalement résolu à poser le papillon mort sur un lit de coton dans une boîte d'allumettes, pour l'enterrer dans le jardin de ses grands-parents.
Depuis ce jour, il s'est mis à en dessiner partout, à en inventer avec des ailes de toutes les couleurs. Il n'a plus jamais touché un papillon. Il se contente de les suivre du regard et de courir après.


Jean-Jacques Marimbert, Les ailes de Camille, Casterman/Cadet, Collection "Comme la vie", 2002, p. 38-39

23:55 Publié dans La poésie des autres

09/05/2008

DE MEMOIRE ET D'ERRANCE

Jean-Louis Bernard nous invite à un voyage dans les tréfonds de la mémoire celle, ancestrale, qui est aussi un passé en devenir, celle qui n'a ni commencement ni fin, qui confère à l'invisible, à l'innommé. Entre brûlure et solitude / quelque chose court. Commence une longue errance aux confins du vide : au croisement de l'arc / de toute mémoire / le vide est fulgurance. Cette quête incertaine dans le halètement de l'ombre veut croiser le sens dérobé : sur ses paumes / se concertent les hasards / laisseront grandir le sens / jusqu'au rien consenti. Marche / inlassable incertaine / marche / de mots en mues au rythme du rien. Toute trace s'efface, dans la permanence du vide, seule une barque de poussière / s'embrume aux berges lasses / esquif / dépossédé de ses empreintes. Ce qui se laisse entrevoir échappe, falaise d'un visage / ruissellement du jour // sur nos fêlures / sur nos mains de gravier / où l'eau se pétrifie. Fixer la poussière avec l'encre, avant qu'elle ne s'éparpille de nouveau : sur la margelle du poème / les sédiments d'un murmure / étanchent nos reflets / dans la rumeur radieuse / de nos ressouvenances. Sous le rituel / de son regard levé / s'incendient les remparts du verbe / jusqu'aux marches / de l'inconnaissable. Retrouver cette mémoire, c'est se libérer du présent et, dans la fulgurance d'un éclair, révéler le sensible : irruption / d'une étincelle pétrifiée / au bord ultime de la présence. Ainsi, sous la pluie du sens caché / l'homme délivré / désarrime ses rivages.


Jean-Louis Bernard, De mémoire et d'errance, Encres vives, 2006
Chronique publiée dans Verso n°130 (sept. 2007)

09:55 Publié dans Chroniques

07/05/2008

LAMBEAUX

Ce matin-là, tu es autorisée à te rendre dans une petite cour pour y jeter des détritus. Deux hommes du pavillon voisin sont occupés à peindre des barreaux. En passant derrière eux, tu te saisis d'un pot de peinture et te précipites à l'intérieur du bâtiment. Tu roules en boule un morceau de papier resté au fond du panier, tu le plonges dans le pot, et cédant à une furieuse impulsion, tu écris avec rage sur un mur, sur la porte des surveillantes, du médecin, en grandes lettres noires dégoulinantes, ces mots qui depuis des jours te déchirent la tête

je crève

parlez-moi

parlez-moi

si vous trouviez
les mots dont j'ai besoin
vous me délivreriez
de ce qui m'étouffe


Tes mains. Ta robe. Tu ne peux nier. Ils te donnent des chiffons, du savon, de l'eau, et t'enjoignent de faire disparaître ce qu'ils nomment des barbouillages. Au lieu de les effacer, tu t'appliques à délayer la peinture et à l'étendre le plus possible.
La sanction est immédiate : dix jours de cellule. Dix jours sans revoir le jour. Une paillasse. Ta nourriture non pas servie dans une gamelle, mais jetée à même le sol.
Quand tu es de retour parmi les chroniques, tu es brisée.
Sur ces entrefaites, la guerre a éclaté. Antoine espace ses visites et l'idée de te faire sortir est abandonnée.


Charles Juliet, Lambeaux, P.O.L., 2001, p. 86-87

21:15 Publié dans La poésie des autres