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14/02/2009

À TANT MARCHER VERS LA LUMIÈRE

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à tant marcher vers la lumière

tu vas vers le dernier verger

où cendre à la cime des roses

plus bleus les arbres noirs

tu vas vers le visage

pensif et qui retourne

sous le silence l’herbe

cueillie de l’autre rive

à trop marcher vers la lumière

on perd soi sens et lumière

au soir

 

Martine Broda, Éblouissements, Flammarion, 2003, p. 125

21:18 Publié dans La poésie des autres

25/01/2009

PETITE VIE

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Tes yeux éclairent

tous les jours

par tous les temps

 

tes yeux reflètent la lumière du monde

 

par tous les temps

tes yeux renferment

les secrets de toutes les vies

 

ceux

que les grands vaisseaux emportent

au fond des mers

que la musique effleure

derrière les paupières closes

qu’un mot, un seul, peut évoquer

quand tout le reste est enfoui

qui sont des éclairs qui jaillissent

 

par tous les temps

tes yeux parlent

de la joie d’être réunis

et de l’infinie solitude

 

Valérie Harkness, Petite vie, Chloé des Lys éd., 2008, p. 63

18:37 Publié dans La poésie des autres

20/01/2009

STRUCTURE

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Les mots ne sont jamais qu’une tentative de trouver le sens, enfoui en soi. Ils ne changent pas le monde. Par le poème, tenter de construire un semblant de structure. Tracer une ligne de compréhension. Ce qui sans lui n’existerait pas.

22:40 Publié dans La poésie des autres

18/01/2009

CE QU'IL FAUT D'OR

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C’est juste ce qu’il faut d’or pour attacher le jour à la nuit, cette ombre (ou ici cette lumière) qu’il faut que les choses portent l’une sur l’autre pour tenir toutes ensemble sans déchirure. C’est le travail de la terre endormie, une lampe qui ne sera pas éteinte avant que nous ne soyons passés.

 

Philippe Jaccottet, Paysages avec figures absentes, nfr/Gallimard, 2002, p. 48

21:17 Publié dans La poésie des autres

16/01/2009

AUSSITÔT RÉVEILLÉE

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Aussitôt réveillée, elle courait ouvrir les volets et voir au ciel s’il ferait beau ce soir. Oui, il ferait beau, et il y aurait une nuit chaude avec beaucoup d’étoiles qu’ils regarderaient ensemble, et il y aurait du rossignol qu’ils écouteraient ensemble, elle tout près de lui, comme la première nuit, et ensuite ils iraient, iraient se promener dans la forêt, se promener en se donnant le bras. Alors, elle se promenait dans sa chambre, un bras arrondi, pour savourer déjà. Ou bien, elle tournait le bouton de la radio, et si c’était une marche guerrière déversée de bon matin, elle défilait avec le régiment, la main à la tempe, en raide salut militaire, parce qu’il serait là ce soir, si grand, si svelte, ô son regard.

 

Albert Cohen, Belle du seigneur, nrf/Gallimard, 1995, p. 358

15:37 Publié dans La poésie des autres

13/01/2009

BEAUTÉ IRRÉELLE

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Beauté irréelle

       irradiante

tu es un poignard

       dans mes yeux

je trempe mes larmes

       à ton tranchant

             tu cilles

                    l’apnée de mon front

21:20 Publié dans La poésie des autres

11/01/2009

LA PART MANQUANTE

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De l’enfance vous ne gardez aucun souvenir. De l’enfance vous ne retenez qu’une maladie. C’est une maladie sans nom. Elle vous vient du ciel tournant d’automne. Elle vous vient de nulle part comme tout ce qui vous est proche. Avec elle revient le ciel plombé d’enfance : le manque de sens, l’absence de tout. L’histoire est toujours la même, mais il ne sert à rien de le savoir. Une lumière se détache du ciel vif. Elle descend sur le cœur qu’elle recouvre tout entier. Elle vous apprend votre disgrâce. Elle vous enseigne votre néant. Tout est là. Vous avez du silence, de l’espace et du temps. Vous avez tout ce qui fait l’agrément de la vie quand la vie manque. Tout est là, sauf vous. Vous appelez cela : la perte du goût.

 

Christian Bobin, La part manquante, folio/Gallimard, p. 87

20:42 Publié dans La poésie des autres

08/01/2009

SANS TITRE

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À coups de machette ils

                   me tailladent

                   la peau

                   et boivent

                   mon sang

 

***

 

Ils plantent leurs lances

         dans mon ventre

         et rient

         aux éclats

 

***

 

Tu me tues chaque jour

         moi ta poupée de chiffon

         fracassée contre le mur

         la tête éclatée

16:16 Publié dans La poésie des autres

06/01/2009

UN HOMME QUI DORT

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Tu n’as rien appris, sinon que la solitude n’apprend rien, que l’indifférence n’apprend rien : c’était un leurre, une illusion fascinante et piégée. Tu étais seul et voilà tout et tu voulais te protéger ; qu’entre le monde et toi les ponts soient à jamais coupés. Mais tu es si peu de chose et le monde est un si grand mot : tu n’as jamais fais qu’errer dans une grande ville, que longer sur quelques kilomètres des façades, des devantures, des parcs et des quais.

 

Georges Perec, Un homme qui dort, folio/Gallimard, p. 140

20:00 Publié dans La poésie des autres

03/01/2009

MA LAMPE EST TON REGARD

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Dans la maison le chat les vibrations de l’atmosphère. La clarté de la flamme vacillante. Le silence de mes pensées. Les nuages passent dans la nuit. Le cahier à épaisse couverture rigide. Or et bleu. Les livres sur la table ronde en bois. Les mots lus, infusés. Les conversations imaginaires. Le regard me suit, patient. Posé simplement, sur mes idées, sur mes va-et-vient, sur mes écrits. Je chemine de l’intérieur. Ma lampe est ton regard.

20:33 Publié dans La poésie des autres