22/06/2011
histoire sans paroles
prendre un papier de fortune
un crayon de hasard
oublier le concret
oublier la main
entrer au profond de soi
tracer des signes sans message
écrire pour ne rien dire
simplement pour le désir
comme d’autres pour pleurer
d’autres pour chanter
***
c’est une histoire sans paroles
comme un vol d’oiseau sur la mer
des souvenirs qui tracent
dans l’espace
des nuées illuminées
c’est une histoire sans paroles
comme neige sur la ville
le temps façonne à son gré
mais le cœur manie le ciseau
le bonheur est œuvre d’art
Andrée Marik, publiée dans Friches n°104, 2010, p. 20-21
20:14 Publié dans La poésie des autres
06/06/2011
DE SI PRÈS
Je parle de ce qui n’est plus, comme un désarroi trop grand, ce qui heurte le corps, sème la pluie des semences, la plaie est réceptacle de toute l’embarcation, dans mon flanc fourmille des mots ininterrompus, je parle de ce qui n’est plus, les amis inconnus, ceux dont l’arbre est nu, j’apprends les mots sans destination, les lettres jamais arrivées, le ventre empli d’un leurre d’écriture, je parle du silence et du chat dans la matière, la peau criblée de balles rouges et l’invention du plein, alors que nous ne faisons que combler le vide je parle du poids certain d’une trop grande présence et de la surface dans laquelle je baigne, de mon inaptitude à faire corps avec toi, qui que tu sois. Je parle de la pauvreté et de l’orgueil, du jugement et de la douleur, des cases où nous nous maintenons, de notre solitude, dans l’éloignement, de notre apparent contentement. Je te parle de si près.
19:56
24/05/2011
PARENTHÈSES
19:56 Publié dans La poésie des autres
10/05/2011
LES MOTS
Bien sûr, ce pourrait être autre chose. Comme ce nuage à portée de main, la route qui sillonne la forêt. Peu de chose, en somme. La maison et ses vieilles poutres, son bric-à-brac recouvert de poussière et de toiles d’araignées. A la fenêtre, le chat vient. Soleil matinal. Dans le bol, le thé fume, la cafetière crache sur le feu. C’est seulement le soir que viennent les mots, après l’orage. La pluie les a détrempés, ils viennent se coucher auprès du feu. Presque honteux d’avoir déserté aussi longtemps. Il n’a pas plu, mais les mots sont allés du côté de la pluie, là où le ciel est plombé d’un gris menaçant, en altitude, là où le vent souffle par rafales. Il leur fallait cela, vagabonder comme des chiens fugitifs, renifler le pas des promeneurs, les traces des renards, humer l’air humide. Se frotter à la bruyère, se rouler dans les ornières, grimper jusqu’au périphérique, puis redescendre. Alors, pourquoi se demander. Les mots. Ils mènent leur vie, voilà. Comme n’importe quel être. Comme le lilas de la cour, les jonquilles sauvages, l’écureuil au bord de la route. Ils sont. Nul besoin de chercher à les justifier.
17:03 Publié dans La poésie des autres
30/04/2011
MATIN DE LUMIÈRE
10:18
23/04/2011
TE VISITE LE MONDE
Cet ouvrage s’organise en deux parties. Dans la première, l’émerveillement de l’enfant dans son ouverture au monde se mêle au mystère du lien qui l’unit à sa mère. tu souris rien qu’à voir ta mère bras tendus / te visite le monde par ce qui rouge ou bleu / n’a de vrai que ton arbre à peluches. Le langage du poème s’apparente à un apprentissage, les mots sont comme malhabiles. Ils sont des legos de couleur assemblés dans le désordre. Le poème est ici métaphore de l’univers de l’enfant, de son monde intérieur. Il suit sa progression dans la découverte de l’environnement. faut croire difficile partir te laisser aller / au-delà le corps le berceau et combien / nécessaire que tes bras la lumière. La difficulté qu’éprouve la mère à laisser sa fille quitter l’enveloppe protectrice s’efface finalement assez vite devant l’épanouissement de l’enfant dans ses premiers pas. Le champ s’élargit avec l’apparition du père dans l’univers, la naissance du caractère. La vie monte, éclate ; la parole émerge. infernale ta langue à toi / tu parles pas que des mots / du charabia en phrases entières. La deuxième partie aborde la pré-naissance et la naissance. ces mois de bruit de terre qui bat / commence très près très loin / quelque chose sous l’écorce. Ce qui palpite résonne, monte avec lenteur, prend le temps de grandir. sous quelle poussée tes doits retiennent / le si plein de terre pendant déluge / flotte berceau avant monde. Le titre du recueil résume à lui seul ces quelques vers : t’émerveilles face au monde / déroules pétales toutes ailes dehors / n’en finis plus de fleurir.
Cécile Guivarch, Te visite le monde, Les carnets du dessert de lune, 2009
09:41 Publié dans Chroniques
13/04/2011
PRÉSENCE
20:35 Publié dans La poésie des autres
10/04/2011
IL NE PLEUT PAS
Il ne pleut pas
Mais la pluie
Recouvre les cœurs
Et le corps
Dans la lumière
Crue
Des néons
Nuit et jour
La poitrine
Se soulève
Mes paroles
Se perdent
Dans le couloir
Je caresse
Son bras meurtri
Je lui chuchote
Des mots
Qui se perdent.
***
J’ai mal de te voir
De ne pouvoir
Te parler et
T’entendre me répondre
J’ai mal de ta nudité
Des tuyaux
Où coule du liquide
De toi
J’ai mal de tes
Meurtrissures
Du silence où tu baignes
Ce no man’s land
Où tu es.
***
Maintenant Papa
Malgré le soleil
Tu es si blanc
Ta peau a pris
Une couleur ivoire,
Si triste
Dans ton linceul
Il émane de toi
Une lumière pâle
Comme une nuée
Froide si froide
Que mon cœur
Fond et que je
Voudrais
Te prendre
Dans mes bras.
18:09 Publié dans La poésie des autres
09/04/2011
L'ATTENTE
L’attente
Au plus près
Des tuyaux
Branchés
L’air rentre
Par la bouche
La poitrine
Se soulève
Il y a du
Liquide
Dans des
Poches
Plastique.
***
L’écran affiche
Des courbes
Des chiffres
De couleur
Rien n’a changé
Dans la chambre
Les mains
Gonflent
Le visage s’affaisse
Un peu plus
Les yeux sont fermés
Le respirateur
Soulève
La poitrine.
***
Papa est loin
Les médecins
Nous disent
Il faut attendre
Les scanners
Montrent des lésions
Le cervelet
Est atteint
Un tuyau écoule
Le liquide
Papa
Ne bouge
Plus
Depuis
Plusieurs jours.
[…]
21:01 Publié dans La poésie des autres
02/04/2011
DE TOUS LES MOTS
De tous les mots
C’est lui le soleil
Mais alors les bras sont assez grands
Ouverts
***
Attendre
Dans le poème sans dire un mot
Trop simple d’appeler
Mais nécessaire
***
Arrivant elle est partout
D’être aussi blanche que bougeant
Surface dispersée toujours une
Aucune page à tourner
Ariane Dreyfus, La terre voudrait recommencer, Flammarion, 2010, p. 45, 47, 60
09:45 Publié dans La poésie des autres