12/06/2012
PIEUVRE
20:02 Publié dans Recueils parus
29/05/2012
JAMAIS TU REVIENS
on me dit d’écouter la mer
à travers les arbres
j’entends
le souffle du vent avec
ta voix dedans
*
on voudrait que tout se taise
alors tu parleras autant ta respiration
tu parleras de ta voix quotidienne
tu parleras autant que tu parleras
tu ne te tairas pas tu parleras
et tu ne pourras pas mourir
non pas mourir tant que tu
parleras
*
cela te va à merveille
tu respires sous ton lit de lumière et d’arbres
tu respires tant que la mer s’y mêle
infiltration d’eau jusque dans tes murs
jusque dans tes os
À Manue
Cécile Guivarch, « jamais tu reviens », N4728 n°21, janvier 2012, p. 46
17:59 Publié dans La poésie des autres
22/05/2012
AVEC UN PEU PLUS DE CIEL
Dans l’avenir à découvert
Comme dans une larme de feu
Où rien ne va à la cendre
Où rien ne va au remords
On comprend qu’il y a de l’or
Qui règne sous la peau
Et une vague violente qui n’espérait que ça
André Velter, Avec un peu plus de ciel, nfr/Gallimard, 2012, p. 21
08:45 Publié dans La poésie des autres
08/05/2012
MIRABELLA MYSTICA
Il ne faut pas les chercher seul, dit-on,
Les mirabelles sauvages, cueillies dans l’éther,
Parce que je n’ai pas trouvé d’arbre, étant parti
Seul : les perles dorées à la lisière du bois,
Colorées comme le velours de tes joues,
Le balancement de plumes des branches, duveteuses
Comme ton corps qui me précède et ne doit pas
M’exciter ; malade encore depuis les vieilles
Histoires… couvert d’un plexus solaire
Épuisé, si je veux être galant homme :
Comme le mirabellier s’en va avec toi,
Je serai seul, et lié.
Les paysages changent de couleur, même de
Tonalité depuis que tu es partie, le suppurement notoire
Des tracteurs se perd, non entendu, dans les
Ormes et les pins, et je cueille les fruits
Cachés des arbres qui sont partis
Comme toi, ayant fui les sandar nus :
Que mes poches soient pleines de pommes de pins
Et de forêt, je ne veux pas le savoir… seul
Me porte dans la lumière ton corps qui me précède,
Depuis que tu t’en es allée, et l’arbre mince
Avec toi, et ta peau couverte du velours
Du rire sous le ciel de notre idylle
Isolée dans la Marche ; dont nous nous
Souviendrons, tant que le pouls de son
Rougissement ne nous fait pas oublier.
Il ne faut pas les chercher seul, dit-on,
Les mirabelles sauvages dont nous avons envie
Depuis longtemps et que nous avons trouvées ici,
Où j’ai retrouvé, plein d’étonnement, ton regard,
Ton sourire. Tu es partie, Mirabelle, rien que la lumière
Dans les ormes et les pins… bientôt, ce sera
L’automne… seul, dans mon dos je cache,
Cueillies dans l’éther, les perles dorées, duveteuses :
Une poignée de cadeaux d’amour pour toi.
André Schinkel. Traduit de l’allemand par Rüdiger Fischer. Saraswati n°11, février 2011, p. 15
19:44 Publié dans La poésie des autres
10/04/2012
DANS UN CORPS ZÉRO CONTOUR
Dans un corps zéro contour, l’enfance est. Qui se tient derrière la porte / et veut boire / et venir ?Chuchotis de l’été. Tilleul / poussière blanche de feuilles.Géométrie, pesanteur, apesanteur. Son poids nous regarde, / pivot furtif / extrait du ciel. Dans un corps zéro contour, il n’y a pas de circonférence. D’où le vertige. Toi non plus / en tant que centre de gravité / expulsant d’un coup / la colonne majeure. Pesanteur, apesanteur. L’odeur légère des tissus / s’enfonce.Ensuite, le vent soulève nos épaules d’au moins mille mètres. Vertige. Soudain, de la pelote / se dévide / une course en désordre.Écheveau des souvenirs ? mourir essaie mais non se hâte tel un fœtus / d’en reproduire le même son / non pas le creux tambour muet.Marie-Noëlle Agniau est solaire venue comme en automne. Le corps zéro contour est une flaque de poussière, le corps enfant déchu du corps maternel. Venir après pour combler un espace vacant. Chez Marie-Noëlle Agniau, il y a toujours ce poids et à la fois ce vide laissé par la perte d’un frère, jamais connu. Je dois bien arriver à tenir entre l’espace et moi la sorte de lutte qu’il faut mener. Se rapprocher du palpable, par l'acte symbolique. prénom auquel rien ne manque je t’apporte un yaourt. Revenir à l’état d’innocence. Le temps se presse en nous à l’état de peluche.
Marie-Noëlle Agniau, Dans un corps zéro contour, La Porte, 2012
12:55 Publié dans Chroniques
23/03/2012
DU BLEU SUR LES DOIGTS
Vous êtes peut-être
À peine cette silhouette
Dans la lumière de l’été
Qui a du mal à se souvenir
Je vous convie donc à prendre cette main
Quand elle reviendra vers la marge
Soyez de ce qui coule lentement
Dans le blanc
Soyez de ce naufrage
Du dire.
*
Vous êtes avec moi sur le chemin
Vous êtes cette voix
Dictant le poème
Et la main
Si près de la mer
Du bleu
Sur les doigts.
Louis Raoul, Feuille de l’air, Éditions de l’Atlantique, 2011, p. 2, 7.
13:11 Publié dans La poésie des autres
11/03/2012
LES HOMMES SONT DES ARBRES
Les hommes sont des arbres
étranges
les racines enfouies dans leur tête
puisent au terreau des mots
ce qui exhausse leur silhouette
aller là-bas
toujours plus loin
derrière l’horizon
Entre ciel et terre
ils sont
dans l’élargie d’eux-mêmes
le bruissement incessant
de leurs désirs d’humanité
à la rencontre des autres
hommes
arbres étranges
là-bas aux confins
Jean-Louis Clarac, Le vacarme du monde, Éditions de l’Atlantique, 2011, p. 55
17:18 Publié dans La poésie des autres
22/02/2012
LES ÂMES PETITES
S’entrouvre la porte sur le palier
On aperçoit une table deux chaises un buffet
Juste ce qu’il faut
la plage blonde du plancher
On sent une odeur de cire fraîche
de propre
On devine des gestes simples
attentifs
des êtres dignes
dans la rectitude.
Véronique Joyaux, Les âmes petites, Les Carnets du Dessert de Lune, 2011, p. 13
15:49 Publié dans La poésie des autres
08/02/2012
MOUJIK MOUJIK
j'ai
un cheveu sur la lan
gue et un chien
tous les trois on habite
dans le
Bois
dedans
des murs en plas
tique ça claque
l'hiver le vent la nei
ge
on s'accroche aux po
teaux de fer aux clous
aux noeuds des
bois
j'use mes bras à que
ça s'envole pas de
bout
Sophie G. Lucas, Moujik Moujik, Editions des états civils, 2010, p. 9
20:27 Publié dans La poésie des autres
15/01/2012
VEILLEUR DE QUART
Tu poses ton doigt de cristal
Sur la géographie disserte du cœur,
Souffleur de verre où se dispersent les bulles
Le long des jours hésitants
Et des latentes angoisses
Je sens bien que tu es en moi
Ce veilleur de quart qui dérive la houle
Vers la profusion bleue du givre,
L'été, pure radiance des fruits,
Emergence instantanée des plus lourds désirs
Rayonnement dur de la pierre
Dans son scintillement secret.
Silvaine Arabo
Silvaine ARABO, poète, écrivain et plasticienne, dirige les éditions de l’Atlantique et la revue de poésie, d’art et de réflexion Saraswati.
12:21 Publié dans La poésie des autres